Les biotechnologies au service du bâtiment
Béton auto-réparateur, murs lumineux ou anti-microbes… la biologie peut servir au développement de matériaux de construction très innovants.
Lorsque l’on parle de biotechnologie, on pense en priorité à la médecine et au secteur de la santé. Pourtant les « biotech » sont également en train de révolutionner doucement le secteur du BTP avec des applications assez remarquables.
Il faut dire que le besoin impérieux de développer des modes de construction plus soutenables et écologiques est un moteur puissant. Et la nature regorge de solutions innovantes qui vont améliorer les choses pour les constructeurs et les habitants.
Des bétons capables de se régénérer
Parmi les biotechnologies appliquées à la construction, la mise au point de matériaux auto-réparateurs est sans doute la plus impressionnante.
Imaginez un béton capable, comme votre peau, de se régénérer et de « cicatriser » ! C’est bien l’idée de plusieurs chercheurs et entreprises à travers le monde.
Aux USA, c’est Congrui Jin, professeur à l’Université de Binghamton, qui mène des recherches depuis 2013 sur le sujet.
« L’idée a été inspirée à l’origine par la capacité étonnante du corps humain à se guérir des coupures, des ecchymoses et des fractures. Une personne prend des nutriments que le corps utilise pour produire de nouveaux substituts pour guérir les tissus endommagés. De la même manière, pouvons-nous fournir les produits nécessaires au béton pour combler les fissures lorsque des dommages surviennent ? », écrit la chercheuse
Après de nombreux tests, son équipe a qualifié un champignon, le Trichoderma reesei, très résistant aux conditions extrêmes. En ajoutant au béton traditionnel des spores de ce champignons ainsi que des nutriments à bases de calcium, on obtient un mélange auto-régénérant. Lorsque des fissures apparaissent, de l’eau va s’infiltrer dans le béton et activer les spores du champignons.
Ce dernier va alors se développer en utilisant les nutriments à disposition et finir par combler le vide avec des cristaux de carbonate de calcium. Lorsque le béton est redevenu étanche, le champignon va créer de nouveaux spores. Ces derniers prendront la relève si une autre fissure apparaît à l’avenir.
L’idée semble révolutionnaire mais n’est pas encore pleinement accepté dans le secteur. Ainsi une startup néerlandaise, Basilisk, propose déjà une offre commerciale pour du béton et du ciment auto-réparateur. Elle se heurte cependant à la frilosité des constructeurs qui voient surtout le surcout à court terme et pas les gains importants sur le long terme. Les nouvelles normes dans le secteur devraient cependant changer la donne assez rapidement.
Des biomatériaux plus performants que le béton
Plutôt que d’améliorer un béton très polluant, passons directement à un matériau plus performant et écologique. Cette proposition se traduit concrètement avec plusieurs innovations issues des biotechnologie.
Le mycelium, appelé aussi blanc de champignon, est un matériau écologique désormais certifié pour la construction. Compressé en brique, il est plus résistant que les parpaing classiques et également plus résistant au feu. A New York, une tour de 15m de haut a même été réalisé grâce à ce procédé.
Autre piste, des cyanobactéries injectées dans un mélange de sable et d’hydrogel vont permettre de créer des brique « vivantes » capable de se reproduire ! En effet en coupant en deux une telle brique et en plongeant un des bouts dans le mélange sable et hydrogel, on pourra obtenir une nouvelle brique. Les bactéries ayant une croissance exponentielle, il en serait de même pour la fabrication des briques. Le tout de manière totalement écologique.
Bambou, bois, miscanthus, les candidat végétal pour remplacer béton et ciment polluant ne manquent pas et font l’objet de nombreuses études et applications. Reste à développer suffisamment ces nouvelles filières pour qu’elles puissent devenir rentable économiquement.
Des murs détox
Des murs biodégradables capables d’assainir votre atmosphère intérieure ? C’est possible dès aujourd’hui avec les recherches de la startup quatari Biohm.
En utilisant des résidu organiques comme les pelures d’orange, l’entreprise a mis au point des matériau innovant pour l’isolation capable de capturer et transformer des éléments toxiques comme les hydrocarbures. Avec des performances thermiques proche du polystyrène, Orb résiste au feu et sa production est bien moins polluante que ses concurrents classiques.
bio éclairage
Enfin dernier exemple frappant des usages des biotech dans le BTP, développer des éclairages naturels grâce à la fluorescence des profondeurs de la mer. Alors que les LED sont devenu la norme pour des éclairages peu gourmands en énergie électrique, l’idée est d’aller plus loin.
En utilisant la luminescence émise par des micro-algues marines que l’on peut cultiver « à l’infini », une startup comme Glowee veut changer la donne. Elle propose une matière première qui permet de nouveaux usages, en particulier dans l’affichage et l’illumination des façades. On est ici sur du zéro énergie dépensée et une recharge par la lumière diurne uniquement !
Si toutes ces innovations semblent encore aujourd’hui assez lointaine, il ne fait aucun doute que les biotechnologies vont transformer en profondeur la manière dont nous construisons à l’avenir. Et dame nature est loin d’avoir révélé tous ses secrets !
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