Construire en fibres végétales
Les fibres végétales ne sont plus l’apanage des bâtiments traditionnels. Découvrez leurs avantages et leurs contraintes.
Et si dans la fable classique des trois petits cochons, la maison en paille n’était pas la pire des constructions ? Dans une version futuriste, elle pourrait même devenir un standard d’excellence avec son bilan carbone exemplaire et son économie circulaire ultra positive !
Sans même se projeter dans un avenir lointain, les fibres végétales ont le vent en poupe dans le secteur de la construction. Chaume, lin , chanvre et autres bambous et roseaux peuvent déjà servir d’alternative à des matériaux de synthèses.
Des matériaux naturels qui présentent bien souvent des qualités supérieures mais qui ont encore du mal à convaincre sur les chantiers. Que ce soit en raison de leur prix élevés, d’une mauvaise image ou encore d’un cadre réglementaire inadapté.
Isolation et fibres font bon ménage
Avec l’évolution des normes dans le bâtiment, l’isolation est devenu un enjeu stratégique pour obtenir les meilleures certifications. Traditionnellement, on retrouve la laine de verre et des matériaux synthétiques comme le polystyrène dans les utilisations courantes.
Pourtant, ces matériaux sont souvent moins efficaces que ceux issus du chanvre ou du lin ou encore de la simple paille ! Pour cette dernière, des garnitures compressées vont faire mieux que la laine de verre car elles ne se tasseront pas dans le temps.
De son côté, la laine de lin associe une isolation thermique, phonique et hydrique de très bon niveau. Le chanvre n’est pas en reste et se décline en laine, enduit ou en feutre pour les travaux d’isolation. Les isolants en fibre végétales sont très écologiques et sont aussi des sources de stockage du carbone émis dans l’air.
À l’inverse les matériaux de synthèse nécessitent l’utilisation de pétrole dans leur fabrication et génèrent de la pollution du début à la fin de leur cycle de vie.
Bambou, l’acier vert des grandes structures
En Asie, le bambou est utilisé depuis des siècles comme structure des constructions ou comme échafaudage. Sa flexibilité, loin d’être une faiblesse, lui confère une résistance remarquable, parfois supérieure à de l’acier ! Ainsi en Indonésie, un pont routier en bambou est capable de supporter le passage de camions jusqu’à 2 tonnes.
Le bambou se cultive facilement et rapidement, il se recycle bien et offre une esthétique désormais valorisée par les architectes. Seul bémol, suivant les utilisations et le climat, le bambou devra être traité chimiquement à la soude ou au sulfure d’hydrogène. Son bilan environnemental est alors mitigé.
En culture intensive hors de ses régions d’origines, il pénalise également la culture d’autres espèces de plantes. Reste que le bambou comme structure a de l’avenir face à un béton polluant et à la réduction des réserves de sable sur la planète pour en produire.
Le béton de chanvre à la côte
A Boulogne-Billancourt dans les Hauts de Seine, l’entreprise générale JR Bat construit actuellement un immeuble résidentiel de 8 étages en béton de chanvre. Une première en Europe !
Mais attention, le nom béton de chanvre peut être trompeur. Car le matériau sert pour la construction de parois verticales et comme enduit. Des fibres de chanvres sont incorporées à un liant hydraulique comme de la chaux ou du ciment. Le mélange bénéficie alors des avantages du chanvre en terme d’isolation ou encore de capacité à gérer l’humidité d’un bâtiment.
Les avantages écologiques du produit sont plus importants en utilisation avec de la chaux. Mais le bilan carbone du procédé reste néanmoins mitigé. Le béton de chanvre reste nettement plus recyclable que les alternatives classiques. Et comme la paille, c’est une ressource locale, facile à produire et qui n’empiète pas sur les cultures agricole.
Pourquoi la fibre a du mal à percer
Alors pourquoi ces matériaux en fibres végétales ont encore du mal à être utilisées sur les chantiers ?
Facteur numéro 1, le prix. Très souvent ces types de produits sont bien plus chers que leurs concurrents classiques. Ils apportent certes des avantages en confort mais ce n’est pas suffisant pour faire bouger les habitudes. Surtout tant que les aspects écologiques ne sont pas valorisés ou que la pollution du recyclage n’est pas incluse dans les prix, la bataille est trop inégale.
Il est certain cependant que les normes environnementales vont changer peu à peu les choses dans la filière fibres végétales.
Autre souci, certains matériaux pâtissent d’une mauvaise image comme la paille censée brûler facilement, le bambou être trop fragile,… Il faut donc que ces nouveaux matériaux puissent être homologué ou certifié anti-incendie ou autre de manière adéquate.
Plus globalement, l’enjeu est bien de poser une réglementation autour de ces innovations pour qu’elles deviennent des options à part entière. Qu’elles puissent entrer dans listes de matériaux reconnus par les assurances par exemple car il est sinon quasiment impossible de les promouvoir.
Quoi qu’il en soit, le temps joue pour la fibre végétale car il ne sera pas possible de soutenir à long terme des matériaux trop polluants, non durables, peu écologiques ou recyclable dans le bâtiment.
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